Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

léon bloy

  • Céline - Bloy

    celine42.jpg

    Céline – Bloy

    Ex: "Bulletin célinien", n°270, n°12, 2005

     

    Le texte que François Gibault avait donné en 1988 au « Cahier de l’Herne » consacré à Léon Bloy vient d’être réédité. Il s’agissait de considérer combien Bloy et Céline ont des traits communs. Extraits de l’avant-propos inédit.

     

    Tous les géants se ressemblent, ils ont des points de correspondance. D’abord, ils sont grands, on leur compte quelques têtes de plus que les autres, certains sont même immenses. Ils ont aussi l’habitude de ne pas faire comme tout le monde, de se démarquer des hommes du commun et de mettre volontiers leurs pieds dans les plats. La parenté entre le géant Bloy et le géant Céline était à ce point évidente que je n’ai pas résisté au plaisir de les confronter, comme je confronte actuellement, pour le Dictionnaire de Gaulle, Louis-Ferdinand Céline et le Général (sans être certain de voir mon article publié), comme je travaille à une confrontation entre Louis Destouches et Jean Dubuffet, autre génie français, singulier, solitaire, anarchiste, créateur, lui aussi, d’un style inimitable et d’une œuvre qui ne doit rien à personne.

     

    764medium_bloyportrait.gif

     

    C’est en rangeant des papiers, et Dieu sait que ce ne sont pas les papiers à ranger qui manquent chez moi, que je suis tombé sur le Cahier de l’Herne consacré à Léon Bloy. Il faut dire que je croule sous des montagnes de livres en désordre, de dossiers déclassés et de papiers entassés n’importe comment. (…) C’est à l’effondrement d’une pile, haute comme un homme debout, que je dois d’avoir retrouvé ce Cahier Bloy, et c’est à Jean-Paul Louis que cet article doit d’être réédité. (…) Malgré l’envie que j’en avais, je n’ai pas « lifté » ce texte, pas changé un mot ni ajouté ni supprimé quoi que ce soit. Il y manque pourtant quelques citations pour montrer que la violence de Bloy valait bien celle de Céline. Ainsi, dans son journal, le 23 février 1901, au lendemain du décès de la reine d’Angleterre : « Crevaison de l’antique salope Victoria » et, après l’incendie du Bazar de la Charité, à un ami : « ...à la lecture de cet événement épouvantable, j’ai eu la sensation nette et délicieuse d’un poids immense dont on aurait délivré mon cœur. Le petit nombre de victimes, il est vrai, limitait ma joie ». Je m’en veux aussi de n’avoir pas cité Léon Bloy écrivant dans Le Sang du pauvre : « Je vis, ou, pour mieux dire, je subsiste douloureusement et miraculeusement ici, en Danemark, sans moyen de fuir, parmi des protestants incurables qu’aucune lumière n’a visité depuis bientôt quatre cents ans que leur nation s’est levée en masse et sans hésiter une seconde à la voix d’un sale moine pour renier Jésus-Christ... ». Quant aux Danois, il les croyait « ...capables de faire mieux que les bourreaux de Jérusalem ». Un demi-siècle plus tard, écrivant de la prison à sa femme, Céline n’était pas plus indulgent pour ses hôtes : « Nous avons affaire à d’épouvantables danois hypocrites – Toute la férocité des vikings, le mensonge des juifs et l’hypocrisie des protestants – des monstres sans pareil ». Qui peut nier, après avoir lu ces lignes, l’existence de fils invisibles entre ces deux hommes ?

     

    Puisque j’ai pris le parti de republier mon texte sans y rien changer, les voici donc, ces deux monstres, dans l’état où je les ai laissés il y a quelque vingt ans, toujours aussi furieux, teigneux, vociférants, géniaux.

     

    François GIBAULT

     

    © François Gibault, Céline – Bloy, Du Lérot, 2005, 40 pages. Édition tirée à 400 exemplaires sur bouffant et quelques exemplaires hors commerce sur vélin de Rives réservés à l’auteur (10 €).